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Crime et ignorance

Croire que les crimes commis par des ignorants et des minables sont forcément plus insupportables que les autres est une erreur d'appréciation courante.
D'abord de tels crimes, en raison des improvisations et des approximations qu'ils comportent, permettent fréquemment de confondre leurs auteurs.
C'est notamment le cas du maçon inculte de Genève qui assassine son hôtesse d'un soir et qui abuse sexuellement de la fille de sa victime et de Youssef Fofana, le chef du « gang des barbares », qui supplicie et exécute Ilan Halimi, un jeune juif séquestré en vue d'obtenir une rançon.

Engrenage absurde

Nous considérons volontiers que le caractère sordide de ces drames tient à un engrenage absurde, produit par l'ineptie de ceux qui les perpètrent. Cependant l'absurdité d'un crime est indépendante du coefficient intellectuel de son auteur. Si l'on considère qu'il est la réponse la moins appropriée (d'un point de vue moral) à la résolution d'un problème spécifique, chaque crime contient de par sa nature une part d'aberration.
Soulignons également que sous le couvert d'une idéologie parfois raffinée, se réalisent les pires ignominies ; les plus insupportables aussi, parce qu'elles cherchent à se justifier après coup.

Les causes profondes

Par ailleurs, il serait inapproprié de confondre le mobile du crime qui dans le cas des deux crimes cités est d'une trivialité déconcertante et ses causes profondes beaucoup plus difficiles à déterminer.
Vous avons tendance à nous insurger contre un procédé qui consiste à déresponsabiliser le criminel en trouvant dans son enfance malheureuse le motif de ses agissements. Tout ramener à une seule cause, qui par ailleurs ne provoque pas forcément chez les individus concernés le passage à l'acte criminel, c'est négliger l'importance de la chaîne d'événements successifs.

Nous devons également faire attention de ne pas attribuer trop d'importance au motif apparent du crime. Le prétexte qui conduit un individu à céder à ses pulsions agressives est souvent du plus trivial. Un sentiment exacerbé, une circonstance particulière, un prétexte ridicule. Quelques secondes d’égarement suffisent parfois pour transformer un gentilhomme en criminel.

Nous pouvons admettre que la motivation profonde du crime échappe habituellement à son auteur. S'il en était conscient il aurait un moyen de lutter contre ses tendances morbides. Expliquer son comportement en invoquant des raisons sociologiques comme la pauvreté et l'ignorance n'est donc pas suffisant. De nombreux crimes échappent à cette logique de l'indigence. Les criminels qui les perpètrent sont éduqués et ne vivent pas dans la précarité. Au contraire leurs crimes sont commis avec une préparation et une minutie parfois remarquables.
Il y a fort à parier que de nombreux crimes inexpliqués cachent des exécutants ingénieux, qui ont mis au service du mal leurs capacités intellectuelles. Ceci ne signifie pas pour autant, que ces derniers soient plus lucides, sur les raisons qui les poussent à agir. Les imbéciles et les astucieux manifestent fondamentalement la même ignorance à comprendre la relation causale qui est à l'origine de leur comportement.